Le Groupe de travail des Nations Unies sur la traite des personnes (un organe subsidiaire de la Conférence des Parties à la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée) et les dialogues constructifs qui ont suivi ont eu lieu du 8 au 10 juillet 2024 à Vienne, en Autriche.
Les Dialogues constructifs constituent le principal forum de discussion et d’échange au sein du système des Nations Unies entre les praticiens des États et les organisations de la société civile sur la traite des êtres humains. Il a été créé pour faciliter les échanges entre les experts en prévention du crime et en justice pénale des pays qui se sont engagés à mettre en œuvre le Protocole des Nations Unies relatif à la traite des personnes. Plus de 901 États dans le monde mettent en œuvre cet instrument international.
Cette année, les thèmes abordés étaient :
- Traite des êtres humains à des fins de prélèvement d'organes
- Trafic de mineurs
La traite d’êtres humains à des fins de prélèvement d’organes consiste à exploiter des personnes pour obtenir des organes, généralement par tromperie ou coercition. Les trafiquants, qui font souvent partie de réseaux criminels sophistiqués, vendent ces organes à des receveurs qui ne veulent pas attendre une transplantation légale. La prévalence mondiale est difficile à estimer en raison de la nature clandestine du crime, mais l’OMS a estimé en 2007 qu’entre 51 et 101 TP3T des transplantations dans le monde sont effectuées à partir d’organes obtenus frauduleusement sur le marché noir. La demande résulte de la pénurie d’organes disponibles légalement, ce qui donne lieu à un commerce illégal lucratif. Les gouvernements consacrent souvent peu de ressources à la lutte contre ce type de criminalité par rapport à d’autres formes de trafic, ce qui permet aux trafiquants et aux réseaux de poursuivre et d’étendre ces pratiques.
Les données sur la traite des êtres humains à des fins de prélèvement d’organes en Espagne révèlent une faible incidence par rapport aux autres pays européens. En 2022, 11 victimes ont été détectées en Espagne pour ce délit, tandis qu’en Italie, le pays européen où l’incidence est la plus élevée, le chiffre a atteint 1 087. Malgré cette faible incidence, il est préoccupant que ces cas surviennent dans des pays où il existe un système consolidé de don et de transplantation d’organes.
L'Espagne est le pays qui donne le plus d'organes pour transplantation, avec un taux de 48,9 donneurs par million d'habitants. La législation espagnole établit que tout citoyen espagnol qui n'exprime pas son opposition au don d'organes et de tissus au cours de sa vie sera donneur à son décès s'il est valide pour le faire. C'est ce qu'on appelle le consentement présumé. Cependant, il faut obtenir le consentement éclairé de la famille de la personne décédée. C'est ce qu'on appelle le modèle espagnol, qui est recommandé par l'OMS.
La traite des mineurs implique leur exploitation sous diverses formes, constitue un délit grave et une violation des droits de l’homme. Le consentement d’un mineur à être exploité est considéré comme non pertinent au niveau judiciaire. Selon les dernières données de l’Office des Nations Unies contre la drogue et le crime (ONUDC), une victime de la traite sur trois est mineure. En Espagne, entre 2017 et 2021, 5 858 personnes, dont 100 enfants, ont été victimes de la traite.
Lors des dialogues constructifs, les représentants de différentes organisations de la société civile ont pu réaffirmer l’importance du rôle de nos organisations dans la lutte contre ce crime, en fournissant des informations et des connaissances sur la réalité de la traite des êtres humains sur le terrain. Cela permettra aux États d’aligner leurs priorités et d’allouer des ressources pour lutter efficacement contre la traite des êtres humains et la prévenir.
Certaines des questions qui ont été soulignées comme étant importantes par les différentes organisations étaient les suivantes :
- agir sur les causes profondes de la traite
- Le rôle des survivants de la traite dans la lutte contre la traite des êtres humains
- la nécessité de partager les connaissances et de sensibiliser nos sociétés
- l'implication des communautés dans la prévention de la traite
- la proactivité des différents acteurs dans l'identification des victimes
- le principe de non-sanction des victimes.
Des inquiétudes ont également été exprimées au sujet de l’exclusion de la société civile de certaines parties clés du mécanisme d’examen et de la lenteur de ce dernier. Bien que nous soyons proches du 25e anniversaire de l’adoption de la CTO, peu de résultats concrets ont été obtenus.
Un appel a donc été lancé à toutes les Parties et à l’ONUDC pour qu’ils redoublent d’efforts et accroissent leur engagement politique en faveur de la mise en œuvre effective et complète de cette Convention, en collaboration avec leurs partenaires de la société civile.
Auteur: Marta Santos, Représentante de l'ONU IBVM/CJ Espagne